Traileuse, statisticienne et mère de deux enfants, Manon Poulaliou mène une vie à 100 à l'heure. Dans moins d'une semaine, le jeudi 26 juin 2025 à 12h, l'athlète de la team Tonton Outdoor sera sur la ligne de départ du Raid de l'Ultra Marin® (100 km). Portrait d'une maman sportive passionnée, amoureuse de voyages.
Originaire de Bretagne, Manon Poulaliou n’a pas mis longtemps à faire parler d’elle sur les sentiers. Discrète mais redoutable, elle fait aujourd’hui partie de la team athlètes Tonton Outdoor, une aventure qu’elle a choisie pour ses valeurs humaines plus que pour la performance. "J’avais entendu parler de Tonton Outdoor sur des courses, notamment en courant avec Élodie Wanherdrick lors du Challenge Ouest Trail Tour. J’ai aimé l’état d’esprit, le côté humain de l'enseigne et ses valeurs", raconte-t-elle. Rapidement, elle se renseigne, pousse la porte du magasin de Nantes et le courant passe tout de suite. Ce qu’elle recherche ? Une équipe. Des gens avec qui partager cette passion du trail qui l’habite profondément. Car Manon préfère courir à plusieurs. Quotidiennement, elle s’entraîne avec ses collègues de travail à la pause de midi, avec son compagnon quand les enfants sont gardés ou avec des copines pour les sorties longues le week-end. "Je préfère partager. L’effort est totalement différent quand on le vit à plusieurs." Statisticienne de métier, Manon n'accorde pas pour autant une grande importance aux chiffres dans sa pratique sportive. "J'essaye de me libérer du travail et de ne pas être focalisée sur le nombre de kilomètres parcourus durant l'année. Je cours aux sensations et surtout pour le plaisir."
Le trail comme fil rouge : du défi à la révélation
Tout commence par un défi entre sœurs. Une inscription aux Foulées d'Atlantisport à Saint-Herblain, en 2019, un an après la naissance de sa fille. Et puis, surtout, un changement de job. Dans son nouveau boulot, une équipe court tous les midis. Elle se greffe au groupe, elle s'accroche et ne s’arrête plus. "Ils faisaient plein de petites courses, alors je me suis lancée aussi. Par la suite, après la naissance de mon deuxième enfant, je m’y suis remise plus sérieusement. Et comme beaucoup, j’ai voulu aller plus loin, allonger les distances." De là naît son goût pour les formats longs, entre 50 et 80 km, où elle dit "apprécier les efforts de 10 à 11 heures", dans un mélange d’endurance, de patience et de dépassement. "Après quelques années d'expérience, je me sens plus à l’aise sur du long. Sur du court, tout est rapide, intense, on n’a pas de place à l’erreur. Sur de la longue distance, c’est une tout autre gestion."
Transvulcania, Templiers, Ultra Marin® : des trails mythiques
Les dossards s’enchaînent, et les courses mythiques aussi. Elle garde en mémoire L'Arvor (56 km) de l'Ultra Marin® et l’Intégrale des Causses (67 km) en 2022, ses deux premiers gros défis. Et le Grand Trail des Templiers (80 km et 3 4000 m de D+) en 2024, évidemment, avec la météo idéale et cette joie intacte de partager un week-end avec ses proches. Suite à sa troisième place sur le Challenge de l'OTT en 2024, Manon a gagné son dossard sur La Transvulcania 2025 et s'est envolée début mai direction les terres volcaniques de La Palma. Malgré une course maîtrisée, cette expérience espagnole laisse un souvenir plus âpre. Froid, pluie, conditions dantesques et un abandon à quelques kilomètres de l’arrivée à cause d'une chute et d'une blessure au genou. Mais cette aventure, elle, est précieuse. "J’ai rarement eu des conditions aussi difficiles. Plusieurs fois, je me suis dit que je ne pouvais pas m’arrêter, sinon je risquais l’hypothermie." Malgré l’abandon, elle veut y retourner. Voir enfin les paysages qu’elle n’a pas eu la chance d'observer. À peine remise sur pied, Manon a un nouvel objectif. Dans moins d'une semaine, le jeudi 26 juin, elle partira à la conquête du Raid de l'Ultra Marin® (100 km). Objectif ambitieux, entraînement soigné, allure réfléchie. "Je vise du 10 km/h, en m’arrêtant aux ravitos. J’ai bossé à 5'40 - 5'45 pour pouvoir tenir." Son tout premier 100 km !
Maman et traileuse : deux vies, une seule énergie
Manon est maman de deux enfants, et ce rôle, elle ne le met jamais de côté. Elle court en travaillant à 80 %, organise ses semaines autour des mercredis libérés et des jeudis sur deux qu’elle consacre souvent à une sortie longue. "Ce jour-là, je cours sans que ça empiète sur le temps avec les enfants. C’est important." Le télétravail lui permet aussi de mieux s’organiser. Et quand vient le week-end, elle choisit une demi-journée pour sa pratique, tout en préservant l’équilibre familial. "Mes enfants m’encouragent. Ils sont souvent là sur les courses locales, avec des pancartes. Ça me touche énormément." Et surtout, elle court pour eux. "Quand je suis en course, je pense à ce que j’ai laissé. Je me dis que je n’ai pas sacrifié un week-end en famille pour abandonner."
La maternité comme tremplin
Interrogée sur ce qu’elle dirait à une femme qui doute, qui peine à reprendre le sport après une grossesse, Manon répond sans hésiter : "Moi, j’ai été meilleure après chaque grossesse. Le sport m’aide à me recentrer, à être plus patiente, à retrouver mon équilibre. Même 30 minutes de sport le midi, c’est déjà bénéfique pour le corps et pour l'esprit !" Elle raconte aussi combien elle trouve important que des figures féminines, comme Blandine L’Hirondel ou encore Anaïs Quemener, prennent la parole sur la maternité, les règles, la charge mentale. "Aujourd’hui, on ose parler de tout ça. Et ça aide." Elle-même court pendant ses règles, sans gêne. Elle reste à l’écoute de son corps, mais n’en fait pas un frein. Elle souligne aussi les avancées des marques comme Smoon, qui proposent désormais des équipements menstruels pour le sport, une révolution pour beaucoup.
Le trail comme appel du large
Chez Manon, la soif d’aventure est omniprésente. Avant d’être traileuse, elle a été voyageuse. Elle se souvient de ce grand périple humanitaire mené avec son compagnon. Rando, sac à dos, poids sur les épaules, nuits à la belle étoile. C’est là que naît son goût pour le dépassement, pour l’effort au long cours, pour cette zone d’inconfort qui fait grandir. Aujourd’hui, elle court pour retrouver cette émotion. "Ce que j’aime par-dessus tout dans le trail, c’est cette part d’inconnu. On ne sait jamais si on ira au bout. C’est une forme de liberté." Et les rêves ne manquent pas : la Diagonale des Fous à La Réunion, île qu’elle connaît bien pour y avoir été en stage. "À l’époque, je ne courais pas. Je croisais des gens qui s’entraînaient et je me disais qu’ils étaient fous. Aujourd’hui, j’aimerais y retourner !" L’UTMB, aussi, lui trotte dans la tête. Avec toutes les réserves que cela implique. "C’est une course mythique, mais c’est devenu une usine. Le système de sélection me freine." Elle penche plutôt vers des courses plus humaines, plus accessibles, où l’esprit de partage reste central.
S’équiper sans surconsommer : l’efficacité simple
Côté équipement, Manon va à l’essentiel. Des t-shirts de course gagnés ici et là. Côté chaussures de trail et sacs d'hydratation, elle fait confiance à la marque française Salomon avec les S/LAB Genesis et le gilet de trail ADV Skin. "Ces équipements sont polyvalents, résistants et très confortables". Pour l’alimentation, rien d’extravagant. Manon fonctionne au feeling. "On ne se rend pas forcément compte, mais l'alimentation représente un gros budget. Prochainement, je vais sûrement tester les produits Overstims et Meltonic. J'aime bien choisir des marques locales."
L’objectif comme carburant : l'importance du dossard
Manon est claire : elle court à l’objectif. Pas de prépa sans but. Le dossard comme moteur. "Si je n’ai rien dans six mois, je m’entraîne beaucoup moins bien. Le dossard, ça structure, ça motive ! Même un 5 km ou un 10 km, au début, c’est déjà un cap." Elle construit ses semaines entre fractionné, sortie longue, séances techniques. Parfois même jusqu’à 1h45 le midi, et jusqu’à 6h le week-end, selon la période de prépa. Et toujours en gardant son équilibre de vie.
À la fois pétillante et déterminée, Manon Poulaliou ne revendique rien. Mais elle incarne cette nouvelle génération de femmes qui allie tout à la fois : sport, enfants, travail et rêves. Elle ne court pas pour la gloire, à la recherche du strass et des paillettes, mais bien pour vivre chaque course comme une aventure. Pour se dépasser. Pour inspirer, à sa façon. Et au fond, c’est peut-être ça, l’esprit trail : courir pour aller plus loin. Mais aussi pour se retrouver, se recentrer, transmettre.